mercredi 6 mars 2013

"Les Trois Richards" de Dan Jemett

Mardi 26 février 2013, nous sommes allés au Palais Beaumont pour aller voir Les Trois Richards, une adaptation de la pièce de Shakespeare Richard III. Elle a été mise en scène par Dan Jemett, qui avait mis en scène deux ans plus tôt La Comédie des Erreurs, au théâtre Saragosse à Pau.


Le texte était non seulement une traduction, mais en plus, il était parfois modifié en un langage plus contemporain, pour que les plus jeunes du public puissent comprendre la pièce.
A ce propos, la salle était assez grande, et comportait une zone "balcon" pour le public, où nous étions. Pour ma part, j'étais placé au milieu de cette zone, ce qui m'évitais la frustration de ne pas pouvoir tout voir.
La spécificité de cette pièce résidait en le nombre de comédiens: ils étaient au nombre de trois, mais jouaient plusieurs personnages. En fait, c'était comme si nous avions affaire à trois Richard III qui nous racontaient leur histoire, tout en nous mimant les autres personnages de leur histoire, témoignant peut-être d'une schizophrénie de Richard III, qui était tellement laid, qu'il se vengeait en exécutant des meurtres. C'était un homme avide de pouvoir. Ainsi cette pièce datant du théâtre Elizabéthain remet-elle dans nos pensées les hommes et les femmes avides de pouvoir d'aujourd'hui.
Mais cette pièce, qui est à la base une tragédie est tournée comme une comédie: je pense notamment au sèche-linge ou machine à laver qui ne peut laver des vêtements maculés de sang, ou bien l'utilisation d'une marionnette pour figurer un jeune personnage. Le rapport entre la première et la dernière image est intéressant à analyser, car il y a une thèse à en tirer: la soif de pouvoir est présente partout et de tout temps. En effet, la première est l'entrée des trois Richard dans la scène, qui s'assoient sur des fauteuils côté cour pour regarder le spectacle. La dernière, c'est lorsqu'ils s'entretuent, mais les trois personnages sont toujours là. Ainsi, tout le monde peut avoir une soif de pouvoir en lui.
En quoi Les Trois Richard est elle une parodie du théâtre de Shakespeare?
Pour répondre à cette question, nous analyserons la scénographie, puis nous finirons par le jeu de l'acteur.


Tout d'abord, le sol de la scène était noir, pour rappeler l'obscurité du théâtre de Shakespeare. Le dispositif scénique était disposé de telle sorte: il y avait un rideau rouge ou pourpre en fond de scène, qui pouvait faire penser, avec les fauteuils et la scène, à du théâtre dans le théâtre, comme dans Hamlet, lorsque la Reine de Comédie et le Roi de Comédie jouent une scène dirigée par Hamlet lui-même. La couleur rouge peut faire penser au sang, thème récurrent chez Shakespeare, et notamment dans Macbeth  où le sang ne peut partir des mains du personnage principal, mais le rouge, c'est aussi la passion. Ce rideau cache donc un symbole de la passion amoureuse: un lit. Comme un masque cachant un vrai visage, ce rideau cache une symbolique récurrente des pièces de William Shakespeare: ce lit ne symbolise pas seulement la passion, mais aussi l'inceste, que l'on retrouve dans Hamlet, entre Claudius, oncle d'Hamlet et Gertrude, sa mère. Et le fait que le rideau soit entrouvert nous évoque aussi les tendances à espionner des personnages Shakespeariens (Polonius dans Hamlet). Le spectateur est alors acteur de la pièce car il voit le symbole de l'inceste, du vice. Le spectateur commet donc lui-même un vice: ce "péché" est redondant car les fauteuils, outre la symbolique du théâtre dans le théâtre, évoquent aussi le voyeurisme de la part des trois Richard. Les fauteuils font aussi lieu de la symbolique de la soif de pouvoir et de règne. Cette symbolique est d'ailleurs rejointe par la couronne dorée, la couleur accentuant évidemment cette envie d'atteindre le sommet de la gloire. La valise transportée par l'un des trois Richard, est le symbole du voyage, évoqué dans Hamlet, lorsqu'Ophélie prend la fuite. Puis il y a cette marionnette sortie de la valise, rappelant le personnage principal classique des tragédies de Shakespeare (Hamlet par exemple est manipulé par son père, et Macbeth par sa femme), et ce héros est toujours tué à la fin, comme l'épée transperce la valise et la marionnette: du sang s'écoule s'ailleurs de la valise, ce qui exagère de la mort dans la pièce, qui rappelle la multitude de morts dans les tragédies de Shakespeare. Nus finirons de parler du dispositif scénique en ajoutant que la machine à laver, côté jardin, ne parvient pas à laver, à effacer les gouttes de sang, comme si ces personnages avaient tout essayé pour les enlever, jusqu'à utiliser une machine à laver. Nous allons maintenant parler des lumières qui sont surtout intervenues pour révéler le lit, le vice, l'inceste. Pour nous rappeler les pièces les plus connues de Shakespeare (Hamlet, Macbeth...)
La musique quant à elle, m'a également fait penser au théâtre dans le théâtre: les personnages jouaient un numéro dans un numéro, et l'utilisation de musiques telles que Highway to Hell. de ACDC au son rock amplifiait cet effet.

Nous allons maintenant parler du jeu des acteurs. Les costumes étaient classiques et réalistes, rappelant l'univers de Shakespeare (couleur pourpre pour la royauté et l'avidité de pouvoir, ou couleur noire pour rappeler le côté obscur et ténébreux des pièces de Shakespeare: toutefois, cette obscurité était ridiculisée par la coupe en jupe, ce qui m'a évoqué un côté féminin d'Hamlet, car certaines mises en scène d'Hamlet  mettent le héros en homosexuel). Ce côté féminin est évidemment bien flagrant lorsque nous parlons d'une comédienne habillée en Richard III. C'est aussi le symbole du masque si l'on veut parler des habits mis par les personnages au cours de la pièce. Ce thème revient sans arrêt chez Shakespeare: dans Hamlet, Polonius porte le masque puisqu'il est envoyé par Claudius pour espionner Hamlet. Dans Macbeth, le masque est porté par Macbeth, et surtout Lady Macbeth, qui se fait passer pour une gentille femme, alors qu'elle est cruelle). Le vitesse de déplacement des personnages est variée, comme l'instabilité de la vie des personnages tragédiens de Shakespeare: pour rappeler la violence chez Shakespeare, tous les personnages m'ont fait penser à des pantins à qui l'on oblige de se suicider, comme le fait Richard III, et c'est ce qu'a plus ou moins subi la marionnette dans la valise. Pour justifier cette idée de pantin, l'on rajoutera que certains cris des Richard sont étranges, comme venu d'ailleurs, d'un corps inanimé qui parle pour la première fois de sa vie.


Tout est parodie dans cette représentation, et c'est pour cela que j'ai détesté: à la base, Richard III est une tragédie, et non une comédie ou un "Three Man Show". Cela ne respectait vraiment pas l'univers de Shakespeare, et j'ai eu l'impression que le metteur en scène se moquait de l'auteur. J'ai tout de même préféré La Comédie des Erreurs  qui respectait vraiment la pièce originale, puisqu'il s'agissait d'une tragédie.



Et vous? Avez-vous vu ce spectacle, et si oui, qu'en avez-vous pensé? 

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